01 canonisation Etape de la cause (Janvier 2020)

Version imprimableSend by email

Etape de la Cause de Mère Thérèse : 1 – Les prémices de la Cause

Dans cette rubrique seront présentées chaque mois, les différentes étapes qui ont conduites à la canonisation de Sainte Thérèse Couderc, le 10 mai 1970

Janvier : Les prémices de la Cause / Février : Le procès diocésain / Mars : La béatification 

Avril : Le procès apostolique / Mai : La canonisation

Janvier : Les prémices de la Cause

 

La reconnaissance par l’Eglise des vertus de Mère Thérèse qui aboutit à sa canonisation est un long processus qui, de sa mort, en 1885, à son inscription au rang des saints en 1970, a vu de nombreuses étapes. En ce mois de janvier, voyons ce qui a précédé l’introduction de sa cause de béatification et canonisation. Si l’idée d’introduire la cause de Mère Thérèse, conjointement avec celle du Père Terme, est rapidement avancée, sa réalisation mettra un peu de temps.

Reconnaissance de la sainteté de Mère Thérèse à sa mort

Après une agonie de près de deux mois, notre Mère Thérèse mourait en odeur de sainteté. Aussitôt la Secrétaire générale envoie une lettre à la Congrégation pour annoncer cette mort (voir l'original) Plusieurs religieuses du Cénacle et prêtres ont témoigné avoir reçu une grâce à l’heure et le jour de son passage au ciel. Dès après sa mort, des souvenirs (reliques) sont demandés et envoyés aux maisons et à des Pères jésuites. La vénération commence.

Le corps de Mère Thérèse est veillé avec une grande dévotion, d’abord à Lyon puis à La Louvesc. La première cérémonie de funérailles a lieu dans la chapelle de la maison de Lyon le 29. Après l’absoute, le cercueil part en train vers La Louvesc où il est veillé toute la nuit dans la chapelle de la maison.

La supérieure de La Louvesc écrit à Mère Chartier : « vraiment je n’ai pas fait auprès de ce cercueil ce qu’on fait habituellement, c’est très réel et toutes nous avons agi de même. On voulait prier pour la défunte et malgré soi on se mettait à la prier. Nos retraitantes ont éprouvé la même impression. L’une d’elles me disait : Vraiment on ne savait que faire auprès de cette Mère, on désirait prier pour elle et on la priait pour soi ».

Aux funérailles, le Père qui officie à La Louvesc s’exclame même : « Puisse ce cercueil s’ouvrir sous les tressaillements de la sainteté, dans l’éclat et le triomphe du miracle. »

A Lyon, dans un esprit de dévotion, la chambre de Mère Thérèse a été laissée dans l'état où elle était au jour de sa mort. Les Sœurs y ont seulement placé son portrait et une armoire à vitrine qui contient ses vêtements et les objets ayant servi à son usage. Chacune va y prier la défunte. 

Mère Thérèse agit du Ciel pour la Congrégation

Les mois qui suivent voient le couronnement de l’œuvre de Mère Thérèse, par la reconnaissance de traits distinctifs de la Congrégation. Ces grâces ont été attribuées par les contemporaines à l’intercession de Mère Thérèse :

Janvier 1886 : Mgr Guibert témoignait sa satisfaction de voir la congrégation se développer et l’appelait aux pieds de la basilique en construction à Montmartre

10 janvier 1886 : approbation de la Messe de la Bienheureuse Vierge Marie du Cénacle

6 juin 1886 : première célébration de la fête de N.D. du Cénacle30 avril 1887 : approbation de l’Office de la B.V.M. du Cénacle

29 janvier 1886 : approbation du Cérémonial de la Congrégation

23 juillet 1886 : approbation définitive des Constitutions

Premières régulations de la dévotion à Mère Thérèse

Durant l’année qui suit la mort de Mère Thérèse, la Supérieure générale règle, par le biais de différentes lettres à la Congrégation, la façon de rendre témoignage à la mémoire de sa Fondatrice.

« Les suffrages qui ont été demandés pour son âme bénie ne suffisent pas à notre piété filiale – écrit-elle le 8 décembre 1885 ; nous invitons les Supérieures locales à les continuer dans une large mesure, pour elle, pour nos Sœurs défuntes et pour toutes les âmes du purgatoire : afin que, selon le bon plaisir de la divine Majesté, ces saintes âmes que notre vénérée Mère secourait durant sa vie avec tant de charité, soient délivrées ou grandement soulagées par nos prières à nos œuvres journalières.

De plus, nous désirons que l'on récite les trois Gloria Patri qui suivent l’Angelus, à l'intention spéciale d'obtenir de la divine Bonté que la cause de la béatification de notre première Mère et celle du Père Terme soient introduites à bref délai ». (voir l'original) Elle demande également que soit commencé le recueil des témoignages sur Mère Thérèse et qu’on agisse pour obtenir à sa prière à la Sainte Trinité des indulgences. (transcription du début de la lettre)

Le 25 août 1886, la Secrétaire générale communique une Ordonnance de la Supérieure générale instaurant une neuvaine pour obtenir la glorification des Fondateurs : « Désormais dans toutes nos maisons la Sainte Messe et une communion générale seront offertes chaque année, le 26 septembre pour la Mère Thérèse, et le 12 décembre pour le Père Terme. Nos Sœurs recommanderont à nos vénérés Fondateurs la conservation de notre Société et son heureux accroissement à la plus grande gloire de Dieu et de Notre-Dame.

Aux mêmes intentions on offrira journellement dans chaque maison une communion et un chemin de croix pendant la neuvaine qui précède ces deux anniversaires. Toutes les Nôtres pourront joindre à ces pratiques celles que leur piété leur inspirera et qui seront approuvées par l'obéissance. »

Suit peu après, le 15 décembre de la même année, une autre note de la Secrétaire générale aux Supérieures locales (voir l'original) pour qu’on prie dans les maisons pour les intentions confiées à l’intercession de Mère Thérèse. 

Premières démarches pour introduire les causes des fondateurs

Mère Marie Aimée, Supérieure générale, ne ménage pas les efforts pour introduire la cause de béatification et de canonisation des fondateurs.

Au Chapitre général d’août 1887, Monseigneur Raffaele Virili, spécialiste en la matière, est nommé Postulateur général de ces causes. Déjà, le 15 mars 1887, une note envoyée à la Congrégation demandait que soient notés les souvenirs sur les fondateurs (voir l'original). Pour développer et affirmer la dévotion à Mère Thérèse, plus de deux milles reliques sont distribuées rien que pour l’année 1887.

Il faut désormais trouver un Vice-postulateur diocésain et un biographe qui doit écrire la vie de Mère Thérèse. La cause de Mère Thérèse devant commencer à Lyon, il doit y être choisi. La cause du Père Terme est confiée au diocèse de Viviers.

L’énergie déployée par Mère Marie Aimée est particulièrement récompensée en 1890. Lors de son voyage au Plagnal et à Sablières, pays natals des fondateurs, elle est touchée par la dévotion de la population pour eux. C’est aussi le pape Léon XIII, qui lors d’une audience, demande des renseignements sur la vie des fondateurs. Ce même pape attache une indulgence de 200 jours à la prière de Mère Thérèse « Puissance du Père » révisée (15 mars 1890). Mgr Angeli, chapelain particulier du Saint-Père et chapelain de notre maison de Rome, promet quant à lui de faire tout ce qui est en son pouvoir. Le R.P. Viérin SJ, désigné vice-postulateur, suggère de rassembler tous les éléments nécessaires. On s’approche petit-à-petit des formalités obligatoires qui ouvriront le procès diocésain pour Mère Thérèse.

 

Les difficultés de la Cause du Père Terme

(image de la cause du P. Terme)

Dans le même temps, le vice-postulateur de la cause du Père Terme s’impatiente et on réfléchit à l’opportunité de continuer. C’est que les difficultés sont de deux ordres. D’abord, même si la réputation de sainteté est établie, le procès a peu de chance d’aboutir car il n’est plus possible de recueillir des témoignages dans une forme canonique. Et puis, le diocèse a déjà l’expérience de la cause de Marie Rivier, fondatrice des Sœurs de la Présentation de Marie, qui a duré et a été coûteux.

Faire connaître Mère Thérèse

Livre du R.P. Longhaye contenant le portrait peint par J. Aubert

Pour faire connaître la figure de Mère Thérèse, on veut s’appuyer sur une biographie qui la présente ainsi que le Père Terme et la Congrégation. La recherche de l’auteur a été longue, mais finalement l’archevêché et la Congrégation se mette d’accord sur la personne du R.P. Georges Longhaye SJ (1839-1920), auteur d’ouvrages dramatiques et religieux, qui travaille de 1895 à 1897 à partir des documents mis à sa disposition, tout en tenant compte des remarques qu’on lui fait. L’ouvrage, « La Société de N.-D. du Cénacle : origines et fondateurs », est imprimé en 1898. Mais un obstacle n’avait pas été prévu : le livre ne peut pas être vendu en librairie. Le cardinal Richard, archevêque de Paris, l’a défendu à cause des événements politiques en France. On est alors en plein dans un climat anticlérical ; des lois ont été votées contre les congrégations religieuses (interdiction d’enseigner, dissolution de la Compagnie de Jésus, obligation pour les congrégations de demander une autorisation, expulsions…). Ce n’est pas le moment de mettre en lumière les instituts religieux. Le livre est cependant abondamment distribué dans le clergé ami de la Congrégation.

Dans le même temps, on a demandé à un peintre habitué à travailler pour les Congrégations religieuses, Joseph Aubert, de peindre les portraits des fondateurs. Un travail qu’il achève en 1892. Monsieur Aubert est tellement content de son travail, qu’il souhaiterait exposer le portrait de Mère Thérèse à l’Exposition universelle de Bruxelles en 1897, car c’est selon lui son meilleur portrait.

L’essor de la Congrégation comme moyen de prouver les vertus de Mère Thérèse

Malgré la volonté d’avancer, en ce début de siècle où règne l’incertitude sur le futur des congrégations religieuse en France, la cause de Mère Thérèse n’évolue pas rapidement. De nouveau, Mère Marie Aimée réclame les prières de la Congrégation pour que l’introduction de la cause de Mère Thérèse aboutisse. A la demande pressante du postulateur, elle demande aussi que le recueil des témoignages se fasse (lettre aux Supérieures du 26 mai 1901). Il y a urgence, en effet, de le faire avant que tous les témoins oculaires ne décèdent.

Aux Chapitres généraux aussi le sujet est abordé. En 1902, on évoque notamment ce qu’en dit Mgr Virili, le postulateur. Pour lui, même si le caractère héroïque des vertus de Mère Thérèse semble évident, la cause sera difficile car les personnes extérieures à la Congrégation pouvant témoigner sont trop peu nombreuses. Il faudrait donc mettre en avant son œuvre – la Congrégation – et essayer de développer la dévotion à Mère Thérèse. Il résumait déjà ainsi sa pensée en 1900 : « Une des grandes manières de faire canoniser votre fondatrice est de prouver sa sainteté par la sainteté de votre Institut et par ses œuvres. Il y aura dans cette Cause moins de faits et de vie extérieure que dans la plupart des autres, peu ou point d'œuvres apparentes ; ce sont ses filles qui sont chargées de faire cette part et ces œuvres qu'elle n'a pas été appelée à accomplir. La prospérité, l'extension de 1'Institut, de chacune de vos maisons sont une preuve de la sainteté de la Fondatrice » (résumé par la R.M. de Foras, Supérieure à Rome, dans une lettre à Mère Marie Aimée).

Au Chapitre de 1907, on affirme encore le « vœu unanime [d’introduire] la Cause de béatification de nos saints fondateurs ; cependant nous en sommes encore au temps de la prière. Nous devons employer avec fidélité ce moyen tout puissant, répandre leurs portraits, leurs reliques, et ne rien négliger pour la constatation des grâces obtenues par leur intercession ».

Le 25ème anniversaire de la mort de notre fondatrice allait, en quelque sorte, donner à la Congrégation l’occasion de mettre en pratique les conseils du postulateur. La Dispersion ne permettant pas une célébration publique, Mère Marie Aimée fixe la manière de commémorer l’événement autrement : « notre piété filiale peut et doit redoubler de zèle pour hâter la glorification de celle dont l'humilité sur la terre a été précieuse aux yeux de Dieu. […] La meilleure manière d'honorer les saints est de suivre leurs exemples et de retracer leurs vertus. Notre vie sera la louange de notre vénérée Mère si nous sommes fidèles à nos saintes promesses, si nous gardons avec vigilance et amour les vœux qui nous lient à la souveraine Bonté, "si nous nous attachons toutes constamment à ne rien laisser de ce que nous pourrons acquérir de perfection, aidées de la grâce divine, dans l'observation entière de toutes les Constitutions et dans l'emploi de tous les moyens de sainteté que nous fournit l'Institut" » (lettre à la Congrégation du 15 septembre 1910).

suite